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Communiqué de presse de l' ANPDE : réforme des modes d’accueil de belles ambitions… sans moyens !

Paris, le 8 mars 2021 – Très attendue par l’ANPDE et les professionnels de la petite enfance, la réforme du cadre normatif des modes d’accueil du jeune enfant de la loi ASAP, qui entrera pour la grande majorité en vigueur en septembre 2021, aura nécessité deux années de travail et de concertation. L’ANPDE, qui a activement participé aux travaux se félicite des avancées réalisées ou en tous les cas du sentiment de vouloir avancer ! Certains aspects, à l’image de la prise en compte des difficultés des assistants maternels (AM) dans leur quotidien professionnel, le contrôle des antécédents judiciaires pour tous les professionnels de l’accueil du jeune enfant, l’administration des médicaments par ces professionnels, l’analyse des pratiques ou encore l’intervention de référent santé sont des atouts supplémentaires pour sécuriser l’accueil de l’enfant. 

Si la volonté de « changer la vie des enfants et des professionnels » pour le gouvernement semble réelle dans les idées, l’ANPDE déplore que les ambitions affichées ne soient pas suivies des moyens permettant de mener les actions envisagées. En outre, l’ANPDE alerte sur des critères à risque pour la qualité d’accueil réservée aux enfants. 

La quantité au détriment de la qualité

Une loi pour garantir les meilleures conditions d’accueil des enfants, de service rendu aux parents ? Une loi visant, comme inscrit dans la charte nationale de qualité d’accueil du jeune enfant, établie en 2017 à favoriser la découverte de la nature, l’éveil artistique et culturel dès le plus jeune âge… Ou une simple loi visant à augmenter les capacités d’accueil ? En lisant entre les « articles », 85 au total, la nuance peut paraître infime. D’ailleurs, un certain nombre de préconisations émises dans le rapport des 1000 premiers jours n’ont pas été suivi dans cette nouvelle loi. 

Les assistants maternels et la qualité d’accueil

Pour permettre notamment aux assistants maternels (AM) de se libérer du temps de formation, tout en étant remplacés par un pair pour l’accueil des enfants dont ils ont la responsabilité, ou pour servir l’objectif d’augmenter le nombre de places d’accueil, la nouvelle loi prévoit un doublement des capacités d’accueil des AM passant ainsi de 4 à 6 voire 8 ! Si les formations sont bénéfiques aux pratiques professionnelles des AM, elles sont au détriment de l’enfant, ainsi accueilli en surnombre. In fine, cette évolution sert plus la cause de la création de places que celle de la formation visant la professionnalisation des AM. Rappelons la position du HCFEA (Haut Conseil de la famille, de l’enfance, et de l’âge) « Les assouplissements concernant en particulier le nombre d’enfants exceptionnellement accueillis par les assistants maternels en plus de leur agrément ne doivent pas entraîner un élargissement pérenne de la norme d’accueil, ni dépasser six enfants de moins de onze ans à la charge exclusive d’un adulte, y compris ses propres enfants. »

Micro crèches et réalités économiques 

La France souffre d’un déficit important de places d’accueil. Pour répondre à ce déficit, l’ouverture de micro crèches privées en tarification PAJE (Prestation d’Accueil du Jeune Enfant) se multiplie. Cependant, dans ces structures, il n’y a pas d’obligation d’avoir la présence d’un éducateur de jeune enfant. La présence du référent technique (responsable de la structure) n’est préconisée que 7 heures par semaine. Cette faible quotité permet au référent technique de multiplier ses missions sur plusieurs sites, laissant ainsi les structures sans manager. Une telle vision entrepreneuriale et économique ne peut être associée à la volonté de qualité d’accueil de l’enfant souhaitée par la nouvelle loi.  Il est dommageable, sous le prétexte que les micro crèches accueillent moins d’enfants, que des personnels soient moins qualifiés que dans les autres structures d’accueil . En outre, ce mode d’accueil exclut la mixité sociale et est inaccessible aux parents en situation de précarité.  Cette logique est contraire aux préconisations du « rapport des 1000 premiers jours » et aux recommandations du HCFEA précisant « les conditions de réussite d’une telle ambition, en termes d’implantation sur les territoires, de mixité sociale, d’inclusion, donc de professionnalisation, de meilleure participation des familles et des associations, et de montée en qualité des services, structures et actions ».

Référent santé et qualification des professionnels

La mission de référent santé octroyée, entre autres, à l’infirmière puéricultrice est une véritable plus-value sur de nombreux points et notamment s’agissant de l’inclusion d’enfants porteurs de handicaps ou de maladies chroniques. En outre, elle favorise l’accueil de tous les enfants, sécurise les professionnels dans leurs pratiques et permet un meilleur accompagnement des professionnels, des enfants et de leurs familles.  Si le projet est une plus-value, le nombre d’heures allouées à la mission par trimestre ne permet pas sa réalisation. L’ANPDE, lors des groupes de travail diligentés par le ministère des solidarités et de la santé, avait préconisé un quota d’heures*.

Autre source d’inquiétude pour l’ANPDE, les probables professionnels pouvant exercer cette fonction de référent santé. Il est en effet prévu de permettre aux infirmiers ayant 3 années d’expérience en modes d’accueil de pouvoir exercer cette fonction ! Or, 3 ans d’expérience en dehors de toute formation pour assurer une démarche réflexive, ne garantit pas un niveau d’exigence de compétences suffisant. Par ailleurs, l’ANPDE rappelle que la formation infirmière (programme de 2009) n’offre plus de contenu pédagogique sur le jeune enfant. Rappelons également, qu’un infirmier disposant d’un diplôme universitaire ou d’un diplôme interuniversitaire en matière de santé du jeune enfant n’existe pas ! La seule formation spécifique infirmière est celle certifiée par le diplôme d’Etat de puéricultrice, spécialité accessible après les trois années de formation en soins infirmiers.

De nouveau, si les ambitions affichées à travers les missions du référent santé sont les bonnes, il est de nouveau regrettable qu’elles ne soient pas suivies des moyens nécessaires.

Les Maisons d’Assistants Maternels (MAM)

Les MAM sont des sites où des assistants maternels mutualisent les ressources et les coûts de fonctionnement pour accueillir les enfants. Pour autant, ces lieux échappent à un certain nombre d’obligations réglementaires et ne sont soumis, à ce jour, à aucun référentiel bâtimentaire national. Rappelons que les professionnels exerçant au sein de ces structures sont peu formés, et ne bénéficient pas de notions administratives et de management. La multiplication de ces différentes missions pour ces professionnels peut les éloigner de leur mission d’AM. Malgré ces contraintes exprimées par l’ANPDE lors des groupes de travail, la loi prévoit néanmoins d’offrir la possibilité pour les MAM d’accueillir 20 enfants au lieu des 16 aujourd’hui, un frein à la qualité de l’accueil du jeune enfant.

Le gouvernement souhaite à travers cette loi favoriser l’augmentation des places d’accueil tout en garantissant la sécurisation et la qualité de l’accueil.  Ces deux principes semblent difficilement compatibles au regard de la réforme du cadre normatif des modes d’accueil du jeune enfant.

*14h/an pour une micro-crèche soit une vraie demi-journée par trimestre (pour 10h/an dans la loi)

28h/an pour les petites crèches soit une vraie journée par trimestre (20h/an dans la loi)

44h/an pour les crèches soit une vraie journée et demie par trimestre (30h/an dans la loi)

56h/an pour les grandes crèches soit deux journées par trimestre (40h/an dans la loi)

70h/an pour les très grandes crèches soit deux journées et demie par trimestre complétée par 10h par tranches supplémentaires de 20

enfants (50h/an dans la loi)


Brigitte Prévost – Meslet

Présidente ANPDE

Sébastien Devillers – Aurasi Communication

06 63 43 89 24

sdevil@aurasicommunication.com